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L’ONCLE ISIDORE

qu’il faut dire, je sais ce qu’il faut laisser deviner, tout aussi bien qu’une princesse.

À défaut de savoir et d’esprit, mon cœur me guidera.

Elle vous aimerait peut-être, si elle savait combien vous êtes bon, et quel amour vous lui portez ?

La jeune fille eût longtemps parlé ainsi, si Étienne, relevant son visage ne lui avait montré ses yeux noyés de larmes. Mariette venait de lui donner la plus grande, la plus entière preuve d’amour que puisse donner une jeune fille, car elle s’était si complètement effacée, que jamais encore il ne l’avait trouvée si grande.

— Ma bonne Mariette, lui dit-il alors, vous êtes bonne, votre affection m’est précieuse ; vous seule m’aimez et vous inquiétez de me savoir heureux. Tout cela est fort égoïste de ma part, mais j’éprouve une immense joie à savoir que je vous occupe ainsi et à me dire : il faut qu’elle m’aime bien, pour aller chercher jusqu’à l’amour d’une autre, si cet amour était nécessaire à mon bonheur.

— C’est que je vous aime beaucoup en effet, dit Mariette tout bas.

— Eh bien, rassurez-vous, Mariette, l’amour même de Mme Hélène ne me rendrait pas heureux.

En parlant ainsi, Étienne avait laissé retomber ses mains sur les genoux de la jeune fille : son esprit tâchait, chose presque impossible, d’analyser le sentiment qui, d’un côté, l’attachait à la jeune femme, et de l’autre l’attrait qui le retenait auprès de l’ouvrière.

— Non, dit-il enfin, non, mon rêve seul n’a pas d’ombre, mon rêve ne me parle pas des choses de ce monde, auxquelles je me suis heurté, et que je veux fuir à tout prix.