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L’ONCLE ISIDORE

les premiers jours, le pli qu’il leur souhaitait pour l’avenir.

Ramasser de l’argent était le grand but de cet être incomplet par l’esprit, par le cœur et l’opiniâtreté de son vouloir, qui lui tenait, à cet endroit, lieu de tout autre finesse et le guidait à coup sûr.

L’économie la mieux entendue fut donc établie dans le ménage. Avec l’aide d’une seule servante, propre uniquement à frotter et à laver, la Chartreuse fut tenue comme une maison d’évêque, et Isidore Letourneur soigné comme un prélat en tournée dans son diocèse.

Mme Daubrée faisait la cuisine elle-même et s’occupait du linge tout en surveillant la fille qui fourbissait, frottait les parquets et les meubles du matin au soir, quand elle n’allait pas laver la lessive à la rivière.

Sous l’active direction de la veuve, le jardin, dont presque tous les produits furent envoyés au marché, devint une mine de gros sous ; si bien que, malgré la somme fort exiguë que son frère lui donnait pour subvenir aux frais du ménage, Mme Daubrée put encore faire des économies.

Sa conscience ne lui permettait pas de se les approprier, elle les remettait religieusement à Isidore Letourneur, à chaque fin de mois, en lui soumettant son livre de dépenses, ce à quoi l’employé tenait énormément.

Quand la chose se fut répétée plusieurs mois de suite, le propriétaire de la Chartreuse annonça solennellement à sa sœur qu’il ne se marierait jamais ; que, par conséquent, ses économies, ou, pour mieux parler, les économies faites sur les fonds et les revenus de M. Letourneur, reviendrait, après lui, à la fille d’Adèle.