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LA PERLE DE CANDELAIR

fut seul, et longtemps il se laissa bercer à cette idée.

Cependant Mme Malsauge avait fait envoler la confiance. Il savait maintenant que cette belle vie touchait à sa fin, que le soleil, pas plus que les vingt ans, ne duraient toujours.

Par cette science acquise, la tristesse se glissait jusqu’à son esprit et jusqu’à son cœur, si heureux jusque-là, comme par une porte ouverte.

L’enthousiasme et l’admiration existaient bien encore, mais le bonheur avait son ombre.

Après avoir été brusquement rappelé sur la terre, le pauvre enfant restait meurtri, un peu désenchanté, retenant encore à deux mains, de toutes ses forces, son beau rêve qui lui échappait, tant il était effrayé de la solitude qui allait se faire autour de lui si son monde idéal venait à lui manquer.

Le lendemain et les jours suivants, il vit encore Mme Malsauge ; quoique le charme fût douloureux, il n’en existait pas moins. Il s’attachait à la suivre comme pour ressaisir ce qui ne se ressaisit point : son ignorance envolée.

Mme Malsauge tenta de nouveau d’aborder les questions d’avenir, de relations, de position. Étienne répondit doucement et tristement ; mais aussitôt qu’il se retrouvait seul, de grosses larmes roulaient sur ses joues ; et ses yeux, cherchant dans l’espace un monde invisible, la tête appuyée sur cette montagne où tant de bonheur lui avait été donné, comme Mignon, il pleurait son paradis perdu.

Ah ! si l’on savait quelles amères douleurs ces jeunes âmes sont capables de contenir, de quel respect, de