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LA PERLE DE CANDELAIR

veuillez me permettre de vous dire que ces heures passées seront mes belles heures entre toutes les autres ; qu’elles resteront dans mon esprit et dans mon cœur, ajouta-t-il en soulevant son front par un mouvement plein de noblesse, comme le souvenir de Dieu a dû rester dans l’âme des anges exilés du paradis ; comme le souvenir d’un bonheur passé et d’une gloire éteinte ; comme l’espérance d’une gloire future et d’un bonheur à venir… dans une autre vie ajouta-t-il plus bas encore en s’inclinant devant Mme Hélène, qui, tout émue, écoutait ce langage si nouveau pour elle, la femme aussi superficielle que charmante.

Maintenant, madame, poursuivit Étienne, voilà le soleil qui baisse ; vous même m’en avez averti. Chaque jour il vient plus tard, chaque jour il s’en va plus tôt.

Ainsi vous ferez, madame.

Que rien ne vous arrête. Votre route est facile, fleurie ; allez, madame, ne changez rien à votre route, ne tournez pas la tête pour voir où je vais.

Je ne vais pas ; je reste. Vous partie et le soleil caché, je n’ai plus ma raison d’être. Laissez-moi donc n’être rien.

Je ne suis pas de votre monde ; oubliez-moi comme on oublie un éventail quand la fraîcheur du soir arrive.

— Je ne veux pas oublier, moi, dit Mme Hélène en secouant sa tête mignonne, et je ne veux pas vous permettre d’oublier davantage.

— Oh ! je n’oublierai pas, dit-il, que me resterait-il si j’oubliais ?

Mme Malsauge savait avoir de l’émotion juste assez