Page:Lacroix - La Perle de Candelair.djvu/191

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
183
L’ONCLE ISIDORE

— Non, répondit Étienne ; mais vous n’êtes plus comme l’autre matin, dans le sentier des jardins ; aussi, sans savoir pourquoi, je suis mal à l’aise à mon tour.

— Vous avez tort, répliqua Mariette ; je serai toujours la même pour vous. Maintenant, quoi que ce soit qui arrive, je ne changerai jamais.

La pauvre enfant avait raison : le sacrifice de son orgueil une fois fait, dès qu’elle était décidée à accepter, sous quelle forme et à quelles conditions que ce fût, l’amitié que lui témoignait Étienne, plus rien désormais ne pouvait la changer à son égard.

Étienne marcha longtemps ainsi, caressant un peu machinalement et d’une main distraite la main de la jeune fille, qui n’eût néanmoins changé sa place pour rien au monde.

— Je serai ce qu’il voudra, s’était-elle dit, pourvu qu’il veuille bien que je lui sois quelque chose.

Elle savourait donc le bonheur de lui être quelque chose, sons savoir au juste quelle chose elle lui était.

Pendant ce temps, Étienne se disait à part lui :

— Cette enfant m’aime d’un amour adorable et dévoué. Je le sens. Je voudrais l’aimer aussi de la même manière, et je ne puis ! Mon affection pour elle est pleine d’égoïsme : j’y cherche un plaisir de l’esprit et des lèvres auquel le cœur ne participe en rien.

Elle donne, je reçois ; je ne puis me le dissimuler.

Malgré lui Étienne en vint à se dire : Elle est peut-être plus heureuse de ce qu’elle me donne que je ne le suis de ce que je reçois. Ne suis-je pas, moi aussi, plus ravi de ce que je donne que de ce qu’on me rend ?

Mme Malsauge traversa sa pensée comme une image