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L’ONCLE ISIDORE

que de ne lui être rien du tout, qu’une étrangère indifférente.

Avec cet instinct merveilleux qui trompe si rarement les femmes, elle se dit que c’était de Mme Malsauge que lui venait son inquiétude, et que c’était de ce côté-là qu’il fallait le rassurer. Elle reprit donc d’une voix douce, qu’elle tâchait de faire le moins triste possible :

— Pour être bien beau, monsieur Étienne, vous n’avez qu’à rester tel que vous êtes.

— Hélas ! ma chère Mariette, je crains bien que votre affection pour moi ne vous aveugle, répondit le jeune homme qui pensait à part lui : « La pauvre enfant ne sait rien du monde, et juge les choses d’après le milieu dans lequel elle a été élevée. »

En cela Étienne se trompait : la jeune fille avait une grande finesse d’esprit, beaucoup de tact, de jugement, et, son cœur aidant, personne ne pouvait mieux qu’elle être bon juge en cette occasion.

Elle comprit le doute qui se cachait sous les paroles du jeune homme, et au lieu de répondre directement à ce qu’il venait de dire, elle continua :

— Je ne suis qu’une fille du peuple : mon opinion pourrait vous paraître sans valeur. Mais puisque je suis une gazette, comme m’appelle Mme Daubrée, je puis vous répéter ce que j’entendais l’autre jour chez Mme Malsauge à propos de vous ; car on s’occupe souvent de vous, par la ville, quoique on ne vous y voie guère, ajouta-t-elle en essayant de sourire.

Il y a là un vieux monsieur, venu de Paris pour passer la belle saison avec Mme Hélène, qui soutenait que ce serait un crime de vous voir cravaté de blanc, comme