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L’ONCLE ISIDORE

— Si loin que cela, dit encore la jeune femme du même ton.

— Reposez-vous là, reprit vivement Étienne. Je vous demande la permission d’aller vous chercher un bouquet, madame.

Cela fut dit si spontanément, le jeune homme avait l’air si heureux de pouvoir faire quelque chose pour Mme Hélène, qu’elle en fut tout émue.

Il n’est pas, en effet, de flatterie pareille à celle de laisser voir à une femme tout l’empire qu’elle a sur nous, quand cet aveu se fait non-seulement sans calcul, mais encore sans la moindre réflexion, quand c’est presque à notre insu que nous laissons deviner notre esclavage.

Comme toutes les divinités, la femme est très-sensible à l’admiration : les actes d’amour et d’humilité qu’on lui adresse ne s’effacent jamais entièrement de son esprit.

Mme Malsauge n’était pas femme à demi. Aussi répondit-elle au jeune homme qui partait sans en avoir obtenu la permission, quoiqu’il l’eût demandée :

— Restez donc, Monsieur Étienne. Si vous me portiez un bouquet, je n’aurais plus, vis-à-vis de moi, de prétexte pour revenir d’ici à quelques jours, et toute souriante elle tendit au jeune homme le bout de ses doigts blancs.

Étienne revint vivement appuyer ses lèvres fraîches sur la main qu’on lui tendait, comme une promesse de retour.

— Je n’irai pas, madame, dit-il ; ah ! bien sûr, madame, je n’irai pas.

— Ah ! le naïf savant, pensait le vieillard en regar-