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L’ONCLE ISIDORE

rité, lorsque l’irascible Thomas jeta les yeux de son côté.

— Ah ! te voilà, maudite bête ! s’écria-t-il, serpent qui va lécher la main de mes ennemis. Attends ! attends ! je vais t’apprendre à vivre, moi !

Quoi qu’en eût dit l’aubergiste, Lou-Pitiou ne l’attendit pas. Bien au contraire, il détalait de son mieux, lorsqu’une fourche, lancée de main de maître, vint rebondir sur le pavé de la rue, à quelques lignes de sa tête, et lui donner, dans les jambes, une nouvelle élasticité.

Il bondit deux ou trois fois ; puis trouvant une rue qui tournait à angle droit, il s’empressa de la prendre, ayant déjà fait maintes fois cette expérience, qu’une bonne cause, fût-elle même bien plaidée, ne met point son homme à l’abri ; tandis que se recommander à Notre-Dame-des-Jambes, pour se retirer de la main du plus fort, pour se garer d’un mauvais coup ou d’une méchante pensée, quitte à s’arranger ensuite, était un acte de profonde sagesse.

Lou-Pitiou était un sage.

Il en fit preuve en cette circonstance, car il ne s’arrêta que lorsqu’il eut dépassé les portes de la ville.

Une fois là, il reprit haleine, s’assit de façon à voir de loin dans le chemin, et attendit Étienne qui ne tarda pas à le rejoindre. Tous deux alors gagnèrent la partie de la montagne où l’on s’était donné rendez-vous la veille.

Le souvenir de ce qu’il avait entendu chez Mariette préoccupait encore le jeune homme.

Il en voulait un peu à Lou-Pitiou de son manque absolu de dignité, et lui fit du regard et de la parole d’affectueux reproches.

Il faut rendre cette justice au Pitiou, qu’il n’était pas