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L’ONCLE ISIDORE

Dans la plaine, se trouve le tabac aux immenses feuilles veloutées, aux fleurs pourpres ou roses ; à mi-côte des moissons de ce blé que ne connaissent point les riches plaines du nord dans lesquelles les froments sont grands, drus, charnus pour ainsi dire, et font la fortune du pays. Là-bas, au contraire, le blé est délié, court, maigre, vivace ; il semble lutter de couleur avec le soleil, et s’être bruni à son contact comme une feuille d’or passée au feu.

Plus haut, aux endroits où la terre commence à devenir rare, apparaît la vigne qui fait une ceinture d’émeraude et de pourpre à la montagne.

Plus haut, plus haut encore, en des endroits où la végétation ressemble à un défi, presque sur le roc, poussent des bois admirables, d’un vert épais et sombre, qui forment une royale couronne et semblent verser le silence et la fraîcheur au front de ces montagnes en mal éternel de végétation.

L’hiver ces montagnes paraissent nues, inaccessibles et semblables à des blocs de granit entassés par les géants lors de leur orgueilleuse tentative. Mais dès les premiers beaux jours elles se couvrent de fleurs et de fruits comme pour rendre au soleil les sourires qu’elles en reçoivent.

Quant aux naturels de l’endroit, tout à fait impropres à comprendre les beautés d’un pareil cadre, ils jacassent de Paris qu’ils n’ont jamais réellement vu ; ils attendent les modes de la capitale, et s’en affublent, Dieu sait comment, dès qu’ils les ont reçues ; ils parlent des auteurs en renom et ne sauront jamais les lire ; ils sont ignares, sales, envieux comme les gens sans valeur, en un mot ce