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LA PERLE DE CANDELAIR

près, sa tête intelligente vers la main de son maître.

Qui oserait soutenir que le jeune homme et le chien n’étaient pas en parfaite communion d’idées ?

Ils firent ainsi le chemin jusqu’aux portes de la ville, où Étienne changea d’allures. Après avoir secoué ses cheveux au vent, comme pour chasser de son front des pensées qu’il ne voulait pas conduire à la Chartreuse, il hâta le pas, laissant au pied de la montagne son air songeur et sa pose un peu abandonnée.

Lou-Pitiou le suivit encore quelques pas ; puis, au lieu de prendre la rue qui aboutissait à l’auberge de maître Thomas, il se jeta brusquement dans un autre passage, au grand étonnement du jeune homme. Étienne, en effet, ayant laissé ses préoccupations personnelles, en même temps que ses songes, en dehors de sa bonne ville, regardait assez en observateur ce qui se passait autour de lui.

— Où va donc Lou-Pitiou ? se demanda-t-il, non sans une certaine curiosité. Il court comme s’il se savait attendu.

Ce disant, le jeune homme se mit à suivre de loin son chien, qui marchait en chien qui sent la table mise, et qui pense, avec raison, que son dîner se refroidit.

Lou-Pitiou n’allait point quêtant le long des murs, semblable à un chien sans aveu, fort en peine de sa pitance. Il marchait droit devant lui sans bondir, mais d’un pas hâté, comme une honnête bête dont le repas est assuré, et qui par cela même a conscience de sa valeur, tout aussi bien qu’un bon bourgeois ayant pignon sur rue et payant patente.

Ah ! la quiétude sur les besoins de l’estomac, quelle dose de dignité et de calme cela donne !