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LA PERLE DE CANDELAIR

— C’est à moi que je refuse, monsieur, continua le jeune homme en s’adressant au vieillard. N’est-ce pas moi qui aurais tout à gagner et qui suis assez maladroit pour tout perdre ! Depuis longtemps, depuis presque toujours, reprit Étienne pendant qu’un sourire un peu triste courait à son insu sur ses lèvres rouges, j’ai vécu fort seul, et je dois vous avouer, en toute humilité, que je n’ai pas le courage de rompre avec cette mauvaise habitude.

L’embarras, la tristesse d’Étienne n’avaient point échappé à Mme Malsauge. Aussi le considérait-elle de cet œil curieusement charmant d’une femme du monde qui, croyant avoir flairé un secret, vent s’en emparer. Elle se sentait prise de l’ardeur aveugle, irraisonnée, qui, poussa notre mère Ève à écouter les confidences du serpent.

— Vous avez tort, mon jeune ami, reprenait paternellement M. de Ferrettes, un peu à voix basse, — en se rapprochant d’Étienne comme pour n’être entendu que de lui seul les bonnes relations sont la fortune, mieux parfois, l’avenir tout entier des jeunes gens ; ne pas les accepter lorsqu’elles viennent au-devant de vous, c’est un grand tort : croyez-en ma trop mûre expérience.

Étienne s’inclina, avec une grâce pleine de respect, devant le vieillard, pour le remercier du sage conseil qu’il venait de lui donner, puis il continua en s’adressant à Mme Hélène, dont le regard ne l’avait pas un instant quitté.

— Puis-je espérer, madame, que vous ne m’en voudrez pas trop de si mal répondre à la bienveillance que vous daignez accorder à un sauvage de mon espèce ?