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LA PERLE DE CANDELAIR

que qu’un enfant par mon âge, et que je suis en outre le plus mince sire de toute la contrée.

Dites donc, Mariette, vous qui vous connaissez en toilettes, que dites-vous de ma veste de velours, faisant irruption chez Mme Malsauge ? Eût-on assez ri de moi ! Le sauvage de Candelair eût-il été assez ridicule ! Qu’en pensez-vous, Mariette ?

Le jeune homme s’arrêta quelques instants pour attendre une réponse qui ne vint pas.

— Vous comprendrez peut-être difficilement ce qui me reste à vous dire, continua-t-il d’une voix encore plus basse ; mais j’aurais préféré me briser la tête contre les rochers que de prêter à rire. La misère a sa dignité, Mariette, et sur ce chapitre-là, je suis orgueilleux comme pas un. Je me suis fait sauvage pour que nul ne me sût pauvre. C’est alors que j’ai pensé à chercher, assez haut pour que personne autre que moi n’y puisse aller à l’avenir, un bouquet unique en son genre.

J’ai fait porter mes fleurs avec ma carte. N’était-ce pas traiter de puissance à puissance ? Si M. Malsauge est riche, ne suis-je pas jeune, alerte, fort, audacieux, et ma sauvagerie même dont rien n’est vrai que l’apparence, n’est-elle pas une excuse à cette apparente impolitesse que j’ai tournée à mon honneur ?

Maintenant, ma fille, que vous savez les choses, n’oubliez pas de les dire telles qu’elles sont. Ce vous serait une honte vraiment d’être mal informée.

Étienne se releva. Il en voulait sérieusement et pour longtemps à Mariette, de l’aveu qu’elle venait de lui faire faire.

— Ah ! monsieur Étienne ! s’écria l’ouvrière en joignant