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L’ONCLE ISIDORE

vait pas moins, malgré lui peut-être, une légère rancune à l’ouvrière pour la façon dont elle avait parlé de la jeune femme.

L’oncle Isidore, malgré le peu de place que tenait son neveu dans cette Chartreuse qui lui devait appartenir quelque jour, ne s’était point départi de sa sévérité à l’endroit du Pitiou ; et quoique Étienne surmontant, par amour pour son chien, ce qu’il y avait de pénible pour lui à adresser une demande à M. Letourneur, eût à plusieurs reprises supplié l’inexorable vieillard de lui laisser son ami, il n’avait pu rien obtenir.

L’économie de Mme veuve Daubrée, doublant dignement la sévérité de son frère, il n’y avait pas dans toute la maison une lampée pour le chien. Étienne souffrait de cet état de choses, et chaque soir ce lui était un crève-cœur de voir Lou-Pitiou, après la fidèle compagnie qu’il lui avait tenue tout le jour, s’en aller demander son souper au hasard des rues.

Mais ce qui l’étonnait outre mesure, et lui semblait un mystère difficile à comprendre, c’est que Lou-Pitiou, de maigre et chétif qu’il était à l’époque de son retour de Paris, était à l’heure présente dans un état parfait son poil avait gagné en brillant et en souplesse ce que son estomac semblait avoir perdu en anxiété ; de telle sorte que si Lou-Pitiou était toujours un chien fort laid, c’était au moins une bête bien portante, ne paraissant plus attendre ses repas beaucoup plus de son adresse que de la charité de Thomas, chez lequel il continuait à trouver place au feu et à la chandelle sans que sa générosité se fût jamais étendue plus loin.

Il tenta vainement de percer ce mystère.