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LA PERLE DE CANDELAIR

spéciale, ou qu’une longue intimité vous en ait donné le droit.

Étienne n’avait parlé à personne de l’invitation qu’il avait reçue. Il ne dit mot de son envoi ; mais son cœur battait à l’idée de savoir ses fleurs dans le sanctuaire habité par la femme de ses rêves.

Ah ! qu’il eût aimé Mariette, si elle eût consenti à lui parler de Mme Hélène, sans colère, sans emportement, sans jalousie ; si elle eût eu surtout le tact de ne pas croire qu’il pouvait aimer Mme Malsauge et de ne pas dire un mot d’amour allant de lui à elle.

Rien ne le blessait autant que de penser qu’on matérialisait son rêve, cela lui était un déplaisir et une souffrance extrêmes. Lui-même, dans ses songes les plus hardis n’avait jamais prononcé, ni songé à prononcer ce mot d’amour qui permet aux fervents de lever les yeux sur l’adorée, de tendre les bras à l’idole, de baiser le bas de son vêtement à défaut de sa main.

Son esprit seul s’était épris de Mme Malsauge, et il y avait bien autrement d’admiration que de tendresse dans le sentiment qu’il avait pour elle.

Qu’on embrassât Mariette, qu’on l’enfermât dans un de ses bras en la serrant contre sa poitrine, qu’on tînt longtemps les mains de la jeune fille enfermés dans les siennes, jusqu’à ce que le regard en vînt à se voiler, tout cela lui paraissait parfaitement simple. Mais que Mme Hélène ne fût pas enveloppée de son charme pénétrant comme d’un manteau de dignité, cela lui semblait aussi tout à fait impossible ; et quoique le souvenir de Mariette, quand il se présentait à son esprit, amenât un frais sourire sur ses belles lèvres un peu épaisses, il n’en conser-