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L’ONCLE ISIDORE

Dieu seul, au reste, sait tous les sentiers qu’elles parcourent ce jour-là.

À peine l’ombre de Mariette eut-elle disparu après elle au bout du chemin, qu’Étienne soupira tristement. Il sentait que sa solitude lui était pénible à reprendre ainsi brusquement, puis il murmura à demi-voix, comme si son idée habituelle rentrait en possession de sa personne :

— Que j’aurais voulu la voir dans sa toilette de vapeur, avec son bouquet de roses à la main !

Le voilà reprenant, sans y songer beaucoup, le chemin de la montagne, emportant un nouvel aliment à son rêve de chaque jour : Cette parure rose jouant dans cette mousseline blanche le faisait songer.

Quoi qu’il fît, Mme Malsauge passait et repassait devant ses yeux, laissant, bien loin derrière elle, l’image de Mariette, quelque charmante, quelque pleine d’attraits qu’elle pût être.

Rendu à son rêve, Étienne rentra aussitôt en plein dans sa préoccupation. La causerie du matin, son bras autour de la taille de l’ouvrière, tout, jusqu’au baiser mis sur ses yeux, tout fut impuissant à le distraire.

Étienne était jeune, mais il avait déjà souffert. Sa pensée sans cesse concentrée ou comprimée l’avait peu disposé à cette belle et insoucieuse gaieté de la jeunesse qui demande à peine un prétexte pour partir en folles démonstrations.

Il avait l’allure calme, étant de ce petit nombre destiné à faire des hommes sérieux, non d’apparence mais en réalité, et sur la vie tout entière desquels les premières années doivent toujours laisser leurs lourdes influences.