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LA PERLE DE CANDELAIR

Pitiou en la voyant marcher si vite, courut après elle et bondit jusqu’à ses mains.

Mariette s’étant arrêtée, se baissa et embrassa le chien entre les yeux, lui rendant ainsi le baiser qu’elle avait reçu d’Étienne, toujours immobile au milieu du chemin, et sur lequel elle attachait, tout en caressant Lou-Pitiou, un regard d’une ardente affection et d’une fierté sans pareille.

Il semblait à Mariette qu’elle venait de remporter une grande victoire sur la belle cliente dont l’attention d’Étienne l’avait rendue si fort jalouse. D’instinct, elle sentait qu’un homme n’oublie jamais ni le premier baiser qu’il donne, ni le premier baiser qu’il reçoit, et cet empire qu’elle voyait bien autrement puissant qu’il n’était en réalité, elle était tout heureuse de l’avoir conquis.

Elle courut presque tout d’une haleine jusqu’à la maison où elle devait travailler, et se mit, comme une brave fille qu’elle était, en devoir de rattraper le temps perdu.

Ses doigts allaient comme le vent ; mais son esprit allait bien encore d’un autre train ! Aussi de subites rougeurs envahissaient de temps à autre son visage et lui faisaient voir double ces points qu’elle dépêchait de son mieux.

Du côté de la basse-ville où elle s’était dirigée, elle ne pouvait aller en journée que chez quelque jardinière. La personne chez laquelle elle travaillait étant, en effet, du peuple comme elle, elle se sentait moins gênée qu’elle ne l’aurait été partout ailleurs, et ne craignait pas de laisser ses pensées aller follement où bon leur semblait.