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L’ONCLE ISIDORE

bouchée de ce festin désiré et encore inconnu jusque-là.

— Oui, que serait-ce donc si vous m’aimiez ?

— Il n’en serait ni plus ni moins, monsieur, répondit vivement Mariette en faisant un léger effort pour se dégager ; car je suis tout aussi jalouse dans mes amitiés que je le pourrais être dans mes amours.

— Bien vrai ? demanda Étienne.

— Qui est-ce qui me forcerait à vous mentir ? répondit-elle en levant légèrement les épaules…

— Eh bien ! Mariette, ne soyez pas jalouse et ne tourmentez pas l’amitié que vous me portez. Je ne m’occupe de personne ; je n’aime personne, pas plus Mme Malsauge qu’une autre ; au reste, en ai-je le droit ?

— Est-ce qu’on demande la permission pour cela ! riposta Mariette avec la vivacité qui lui était propre.

— Sans en demander la permission, faut-il au moins espérer ne pas être trop mal reçu. Mais, comme je vous l’ai dit, je n’aime personne.

— Bien vrai ? demanda Mariette à son tour en levant sur le jeune homme un regard radieux.

— Aussi vrai que voilà le premier baiser que je donne, et la première bonne matinée que je passe.

Ce disant, Étienne appuya ses lèvres sur les yeux de la jeune fille ; il les y laissa si longtemps qu’ils n’y voyaient plus clair ni l’un ni l’autre quand il se releva. Quand Mariette, s’arrachant de ses bras, lui dit en courant vers le bout de la rue :

— Voilà sept heures. Je ne puis rester davantage. Au revoir, monsieur Étienne, au revoir !

Étienne ne fit pas un pas pour la suivre, ne tenta pas de la retenir, ne fit rien pour la rappeler. Mais Lou-