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LA PERLE DE CANDELAIR

la parole à son tour, approchant son visage auprès du sien, si bien que comme il avait fallu qu’il se baissât vers elle, elle sentait l’haleine douce et tiède du jeune homme sur ses yeux, sur son front, presque sur ses lèvres.

Il la considérait en même temps fort curieusement, et toute sa physionomie respirait une de ces admirables indulgences, comme la jeunesse seule est capable d’en ressentir une de ces indulgences dont le pardon est toujours prêt à se traduire par une caresse, par un baiser.

Mariette considérait la lèvre rose et humide d’Étienne, qui l’attirait et parlait de si près, qu’il lui semblait respirer ses paroles. Elle se sentait aussi toute prête à pardonner, pourvu toutefois qu’il fît le premier pas.

— Ah ! Mariette, disait Étienne, que vous seriez jalouse si vous aimiez d’amour ; car, moi, que vous n’aimez point ainsi, vous ne pouvez supporter que je parle, par simple curiosité, d’une femme dont chacun s’occupe dans Candelair.

Mariette tremblait, légèrement un peu de dépit, beaucoup d’émotion ; car enfin, pensait-elle sans pourtant se le dire aussi clairement que nous le disons, on ne parle pas de si près aux gens quand ce n’est que pour leur dire de pareilles choses.

— Si vous m’aimiez, que serait-ce donc ? continuait Étienne, qui n’analysait très-certainement pas ce qui se passait chez l’ouvrière, mais qui éprouvait une certaine sensation de bien-être en face de son émotion.

Comme tous les hommes jeunes, qui mordent pour la première fois à cette jouissance : parler en toute liberté, sur l’amour, à une femme qui les écoute, il ne retirait ni n’avançait les dents ; il savourait en entier la première