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L’ONCLE ISIDORE

de la même nuance. M. le préfet avait fait remettre chez elle, dans la journée, un bouquet des plus belles roses du jardin de la préfecture. Sa robe était fort décolletée ; mais comme elle est un peu mièvre — je me sers de ce mot parce que c’est elle-même qui l’emploie pour parler de ce que nous autres, gens de rien, nous appellerions bel et bien de la maigreur — elle avait jeté, chiffonnée autour de ses épaules nues, une grande dentelle blanche qui ne laissait plus voir sa… mièvrerie qu’à travers un nuage. Elle avait un éventail rose et blanc.

Quand elle marchait, elle était ravissante. J’ai entendu M. Malsauge lui faire compliment, et lui dire que rien ne lui seyait comme sa toilette de vapeur.

Tout cela avait été débité d’un ton qui ne manquait pas de mordant. La charité de Mariette n’allait pas jusqu’à ôter ce qu’il pouvait y avoir dans sa voix de sec et de cassant, qui faisait penser à un emporte-pièce.

Sans s’être brusquement arrachée du bras que le jeune homme avait passé autour de sa taille, elle ne s’y abandonnait plus avec le même laisser-aller. Dans sa façon de se raidir, comme dans ses paroles, on sentait une sérieuse hostilité. Il était facile de voir néanmoins que la colère n’était pas la seule passion qui grondait en elle : ses yeux, humides malgré leurs éclairs, en disaient plus long qu’elle n’aurait peut-être voulu.

Étienne, cependant, bien que la taille de la jeune fille ne fût plus abandonnée ni souple, la tenait un peu plus étroitement encore.

Sans la laisser achever, ce qui eût pu se faire attendre longtemps, à en juger seulement par la passion et l’action qui allaient chez elle toujours croissant, il prit