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du 24 au 30 juillet. — 1870.

en bavardant et chantant comme de véritables blanchisseuses. Tous ces braves garçons font plaisir à voir dans leur campement, où toute la population afflue pour les visiter ; mais en ville ils sont trop buveurs et braillards. Ce n’est pas là une bonne tenue pour des militaires.

Le mardi 26, la garde impériale part dès le point du jour et défile sous mes fenêtres, par le faubourg Saint-Georges, pour se rendre à Metz, et marcher vers la frontière. La vue de ces beaux et fiers régiments qui marchent musique en tête d’un air si martial me réjouit et me réconforte. Mais l’idée que de tant d’hommes jeunes et pleins de vie, il en restera peut-être plus de la moitié sur les champs de bataille, me remplit de tristesse, et, sans attendre la fin du défilé, je quitte ma fenêtre, les yeux humectés de larmes.

Le mercredi 27, visite à mon ami Mézières, notre ancien collègue à la Faculté de Nancy, et aujourd’hui professeur de littérature étrangère à la Faculté des Lettres de Paris. Il était à Creutznach, dans la Prusse rhénane, quand la guerre a éclaté. Il est revenu à grand’peine en France et par de longs détours. Il avait fait une pointe à Ems, où se trouvait le roi Guillaume et où s’est décidée, après la dernière démarche de M. Benedetti, la rupture