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du 19 au 23 juillet. — 1870.

enfin sur les dangers que nous n’avons pas courus.

Un trait de patriotisme que je me reprocherais d’oublier : Ces jours-ci, dans la cour de l’hôtel de Metz, je me suis croisé avec le comte de Brancion, mon ancien condisciple à Louis-le-Grand. Il était suivi d’un garçon de bonne mine, d’une allure décidée et paraissant résolu à bien faire. — « Vous ici, lui dis-je ! Qui vous y amène dans un pareil moment ? — Parbleu ! la résolution d’enrôler mon fils comme volontaire. Il ne sera pas dit que cette guerre se fera sans qu’un Brancion y ait payé de sa personne. Tout ce que je regrette c’est qu’il ne me soit pas possible d’en être moi-même. » — En effet il faut qu’un Brancion soit là. Ils ont l’habitude d’en être depuis ce sire de Brancion que nomme Joinville et qui fut, comme lui, un compagnon de saint Louis, dans la croisade d’Égypte. Il y aura donc un Brancion à l’armée du Rhin. C’est dans la tradition de la famille.

Un dernier mot sur les impressions que j’ai rapportées de Metz. Je tenais à croire que la ville était en parfait état de défense. Mais le président Salmon m’a bien cruellement détrompé. Il m’a dit que les travaux des forts n’étaient pas achevés, et que l’armement n’était pas complet. De mon côté, j’ai fait des remarques alarmantes. Les camps m’ont paru mal approvisionnés. Les chevaux restaient sans litière sur l’herbe desséchée, les soldats attendaient