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mercredi 31 août, jeudi 1er septembre. — 1870.

che d’habitude officiellement close, témoin celui qu’il me disait ce matin quand je lui adressai mes compliments de condoléance : — « Ces Messieurs de là-bas s’imaginaient donc que je pouvais défendre le département avec mon cure-dent. » — Enfin en l’associant à la disgrâce où Nancy a eu le malheur de tomber auprès de l’opinion publique, elle lui a valu des témoignages d’estime et de regret, auxquels un autre genre de chute n’aurait pas fait songer.

Le soir, après la prière à la Cathédrale, en nous promenant sur la place Royale, Fliche et moi, nous constatons qu’il n’y a plus ni canards, ni fausses dépêches, et qu’il ne s’est pas encore fait un tel silence sur les événements. Ce n’est pas notre réclusion qui en est la cause, mais c’est qu’il y a des deux côtés ordre de se taire sur les opérations des armées. En effet, on va frapper les grands coups et nous touchons au moment décisif. Nous sommes muets, sous le poids de cette solennelle attente. Chacun renferme dans son cœur le secret de ses craintes ou de ses espérances. Quelques-uns se laissent aller, sur la foi de je ne sais quels indices, à l’espoir d’une prochaine et éclatante réparation. Mais soit pressentiment, soit défiance fondés par nos premiers revers, je n’ose compter sur le retour de notre fortune, et je rentre tristement, poursuivi par l’appréhension de quelque grande catastrophe.

Jeudi 1er septembre. — Le désir d’arriver à la