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lundi 29 août. — 1870.

retrouvent partout dans le jardin. Le soir, les chefs les ont régalés d’un bulletin leur annonçant que Mac-Mahon était tué, Bazaine blessé mortellement, et que Metz s’était rendu. Ils ont crié hurrah ! et sont allés se coucher joyeusement dans les écuries et dans la grange. Il paraît que les Prussiens ont régularisé officiellement la fabrication de leurs canards pour entretenir le moral de leurs soldats en gaîté. C’est le pendant de ce que nous voyons se produire chez nous sur la place publique, où le canard est, quoi que l’on en dise, un moyen efficace de consolation. Mais hélas ! quelle différence ! Le canard prussien se contente d’ajouter à la réalité, le nôtre est toujours en contradiction avec elle.

Au retour de Sainte-Camille nous passons par la gare du chemin de fer toujours assiégée d’une foule qui s’agite et dont le tumulte rend de plus en plus difficiles les rapports de la ville avec les autorités prussiennes. Le maire, que nous rencontrons, se plaint vivement de cette turbulence qui provoque de perpétuels conflits avec l’étranger et qui rend sa position à peu près insoutenable. On en viendra, dit-il, à réaliser la menace de mettre des garnisaires chez tous les habitants. — « Que ne faites-vous élever des murs en planche pour masquer ces passerelles d’où les gamins turlupinent les agents du chemin de fer et les entravent dans leur service ? Dès qu’on ne pourra plus plonger sur la voie ferrée, on perdra