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jeudi 18 août. — 1870.

à grains sont vides : plus de blé, plus d’avoine, plus d’orge. Les écuries ont perdu leur meilleur bétail, leurs plus beaux chevaux qui sont attelés aux voitures de guerre. Les propriétaires ou les garçons de charrue ont dû mener, tristement, leurs équipages et leurs denrées à la suite des armées ennemies.

« Qui préparera la terre ? Qui jettera dans son sein la semence de la moisson future ? Et en attendant comment nourrir les animaux nécessaires à la culture, puisque tout s’est fondu, tout a disparu au lendemain de la récolte ?

« Par suite d’une sécheresse exceptionnelle, la campagne était déjà menacée d’une année des plus difficiles ; en ce moment la ruine est complète, indicible, et il faudra de longues années pour guérir les plaies de huit jours d’invasion. Nous disions avant-hier : Pauvre Nancy ! Nous sommes plus fondés encore à nous écrier aujourd’hui avec la mort dans l’âme : Pauvres campagnes de la Lorraine et de l’Alsace ! »

Il circule toujours des bruits de succès impossibles et invraisemblables. Hier, c’était celui de l’extermination de deux régiments de cuirassiers blancs, sous les murs de Toul. Aujourd’hui c’est une défaite des Bavarois, également devant Toul, avec la mort du général Hartmann. On ajoute que le prince Albert, ou Albrecht, a été coupé en deux