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frappa Catherine et lui causa une satisfaction intime, dont elle ne s’expliquait pas la cause. Elle se félicita davantage d’avoir conservé la vie d’un enfant qui devait être si cher à ses parents. Elle ne se rappelait pas que ce pauvre enfant était un orphelin.


— On est probablement bien inquiet de vous, dans votre famille ? lui dit-elle. Il serait temps de vous y reconduire ou du moins d’avertir vos parents que vous êtes ici sain et sauf et en sûreté.


— Je n’ai pas de famille, Madame, répondit-il avec un sourire mélancolique. Ne vous l’avais-je pas dit ? Je ne suis pas trop pressé, j’en conviens, de retourner à la boutique de maître Nicolas Courtois, ajouta-t-il en souriant avec malice. J’avais fait aujourd’hui l’école buissonnière, pour aller à la pêche, et sans vous, ma très noble demoiselle, sans votre ami qui m’a gentiment tiré de l’eau, j’étais bel et bien noyé, pour ma punition.


— Ce maître Nicolas Courtois, lui demanda Catherine, n’est-ce pas l’imprimeur de Poitiers ?


— Je n’en connais pas d’autre, ne vous déplaise, répliqua l’enfant ; c’est un honnête homme qui sait son métier, mais qui est un peu rude pour ses pauvres apprentis. Imaginez qu’il les bat comme plâtre, à propos de rien et de tout.


— Vous a-t-il donc battu, ce méchant homme, mon enfant ? dit Catherine. Ce n’est pas dans son imprimerie qu’on imprimera mes vers, je vous assure ! Un homme qui bat les enfants est un vrai monstre ! Vous êtes donc ouvrier imprimeur, mon cher enfant ?


— Je le suis et je m’en fais gloire, repartit l’enfant.