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que nous estimons, que nous aimons, comme si c’était un vieil ami, voulait me rendre le fils que j’ai perdu, en devenant mon gendre, et me demandait ta main ?


— Monsieur, je ne saurais être que très sensible à une telle marque de bienveillance et d’affection, dit Catherine en baissant les yeux. Vous pouviez déjà compter sur mon amitié ; j’y joindrai maintenant une bien douce reconnaissance. Mais, je pensais vous l’avoir déjà déclaré avec franchise, le mariage n’est pas fait pour moi !


— Et cependant, Mademoiselle, répondit Jules de Guersens avec tristesse, nulle mieux que vous n’est faite pour le bonheur d’un mari ! Vous ne m’accuserez point de m’être trop pressé de parler et d’avoir révélé un secret que vous deviez être la première à connaître. C’est votre mère elle-même qui m’a forcé de le trahir…


— Contentez-vous d’être mon ami, mon meilleur ami, reprit-elle en lui tendant la main et en serrant la sienne qu’elle sentait tremblante et glacée. Je vous jure, devant ma mère, que je ne me marierai jamais.


À ces mots, elle dissimula sa profonde émotion, en faisant comprendre, par un signe, à Jules de Guersens, qu’elle était appelée ailleurs par des motifs qu’il pouvait apprécier, et elle sortit en le priant de rester encore avec madame Neveu, jusqu’à ce qu’elle eût fini une tâche d’humanité dans laquelle il avait eu sa part. Elle revint donc, sous l’impression d’un grand trouble, auprès de l’enfant, qui était déjà habillé et qui se regardait avec surprise dans ses nouveaux habits, si beaux et si riches qu’il n’en avait jamais porté de pareils dans toute sa vie. Ce costume lui donnait un air de distinction native, qui