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bien touchante, dont l’ange Raphaël aura tout l’honneur.


Jules de Guersens serra la main de la jeune fille, et il la contempla en silence avec une tendre admiration. Catherine avait reposé ses regards sur l’enfant qui dormait du sommeil le plus paisible. Le médecin s’éloigna en soupirant, ému et charmé de la délicate sollicitude avec laquelle mademoiselle Neveu remplissait son rôle de garde-malade.


— Heureux, pensait-il en se rendant chez madame Neveu, qu’il eût volontiers oubliée pour rester avec sa fille, heureux celui qui sera jugé digne d’obtenir la main de cette muse d’innocence, que j’ai surnommée la Minerve française. Elle vaut plus, à elle seule, que les neuf Muses du Parnasse antique !


Madame Neveu s’étonnait et s’attristait que sa fille l’eût abandonnée si longtemps, et encore n’était-ce pas elle qui lui amenait le médecin. Celui-ci ne réussit pas à faire agréer à cette mère jalouse et exigeante les excuses qu’il s’était chargé de lui présenter de la part de Catherine. Madame Neveu ne put réprimer un mouvement de dépit et d’impatience : elle leva au ciel ses yeux sans regard et ne put s’empêcher de gémir.


— Je comprends, dit-elle, que la compagnie d’une mère aveugle et souffreteuse ait assez peu de charmes pour une jeune fille, qui doit penser au mariage et qui met son plaisir dans l’étude et la culture des lettres. Certes, à cet égard, très cher et bon docteur, je dois vous savoir mauvais gré d’avoir éveillé, par des éloges, l’ambition poétique de Catherine. Elle ne songe maintenant qu’à faire