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une bonne action de rabelais

fatigué, à son presbytère, après être allé par les bois de Meudon jusqu’au hameau de Villacoublay, près de Vélisy, pour administrer les derniers sacrements à un moribond, il se sépara tout à coup de son sacristain, qui portait les saintes huiles et l’eau bénite ; puis, il se mit à la recherche des vers luisants qui brillaient dans les herbes, comme des feux follets, et il en ramassa une quantité pour les rapporter dans son cabinet d’étude, où il faisait de curieuses expériences sur la nature de la lumière phosphorescente que ces insectes répandent autour d’eux durant les chaudes nuits de l’été. Il n’avait pas pensé à se pourvoir d’une boîte fermée afin d’y mettre le produit de sa chasse, sans l’endommager ; mais il eut bientôt imaginé un moyen de suppléer à l’absence de l’attirail d’un naturaliste : il releva les bords de son grand chapeau, de manière à former tout à l’entour une espèce de cuvette, dans laquelle il déposa sur une jonchée d’herbes tous les vers luisants qu’il put recueillir, et ces vers jetaient des éclairs intermittents qui l’environnaient d’une auréole lumineuse. Il avait aussi ramassé à terre une grosse chauve-souris, blessée par quelque oiseau de proie qui n’avait pas réussi à l’emporter à moitié morte. Cette chauve-souris, qu’il voulait conserver pour la disséquer et en étudier l’organisme anatomique, il eut l’idée de l’attacher, sur le sommet de son chapeau, avec trois ou quatre longues épingles qui lui avaient servi à relever sa robe sur ses genoux, pour marcher plus librement, sans s’accrocher et se déchirer aux épines des buissons de houx.

La lune était dans son plein quand il sortit du bois et marcha quelque temps à découvert, dans un sentier peu