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airs, des essaims d’abeilles qui avaient quitté les roches voisines et qui allaient chercher ailleurs de nouvelles demeures. Valentin prenait un vif intérêt à ces émigrations des jeunes abeilles, et il en avait étudié plus d’une fois les curieux épisodes, en admirant le merveilleux instinct de ces mouches industrieuses. Il vit un de ces essaims, qui s’abaissait vers le sol avec des bourdonnements confus et qui semblait vouloir s’arrêter quelque part, pour se mettre en groupe et pour attendre le moment favorable d’achever son voyage. Il suivit à distance, en s’avançant avec lenteur, l’essaim qui se portait d’un endroit à un autre, et cherchait la meilleure place où il pourrait camper et se reposer ; mais l’essaim, après avoir choisi successivement plusieurs arbres autour desquels il se rassemblait comme pour tenir conseil, reprit tout à coup son vol, en s’élevant dans les airs et en s’éparpillant à travers la forêt.


Valentin, à son insu, avait employé plus d’une heure à cette étude de naturaliste ; lorsqu’il revint au pâturage, où il avait laissé les quatre vaches ; il ne les retrouva pas, et, s’imaginant qu’elles étaient entrées dans le bois pour y prendre le frais et pour paître à l’ombre, il y entra aussi, en les appelant par leurs noms et par des sifflements qu’elles avaient l’habitude d’entendre et de comprendre. Pas le moindre beuglement ne répondit à ces appels redoublés, que lui renvoyaient seulement les échos de la forêt.


Alors il se rappela l’avertissement que le Père ermite lui avait communiqué la veille, et il se demanda anxieusement si les vaches n’avaient pas été volées par ce juif allemand,