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autour de ses reins ; il avait accepté aussi un bâton noueux en bois de houx, que le berger lui donna pour se défendre contre les chiens errants ou même contre les loups, qu’il viendrait à rencontrer sur son chemin. Il n’avait pas de but déterminé, en se dirigeant vers la ville de Langres, et il ne songeait qu’à s’éloigner de la ferme où il n’aurait eu rien de bon à attendre. Il marcha donc à grands pas, pendant plus de trois heures, et ne suspendit sa marche, que pour faire honneur aux provisions que le vieux berger avait mises dans son havresac. Valentin s’était arrêté au bord d’une petite rivière, assez profonde, qui longeait la route, à dix ou douze pieds en contre-bas de la chaussée. Il mangeait de bon appétit, et rêvait aux circonstances imprévues qui allaient décider de son avenir, lorsqu’il entendit le trot d’un cheval qui s’approchait de son côté, mais il se trouvait dans un fond ombragé, d’où l’on n’apercevait pas la route. En ce moment, le cavalier, qu’il ne pouvait voir, venant à passer à peu de distance de lui, fut tout à coup désarçonné par sa monture, qui l’envoya tomber, la tête en avant, dans la rivière. Cet homme ne savait pas nager et il aurait été noyé infailliblement, si Valentin, qui ne savait pas nager davantage, n’eût fait acte de courage et d’adresse pour le sauver. L’enfant eut assez de présence d’esprit, en face du danger que courait cet homme, pour lui porter secours à l’instant : il déroula rapidement la corde qu’il avait autour de son corps, fit un nœud coulant à l’un des bouts de cette corde, et la lança si adroitement, au milieu de la rivière, que le nœud coulant saisit par le cou le malheureux qui se noyait et