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dès qu’il serait devenu savant : ce qui était le but invariable de ses espérances.


— Vous plaît-il, M. le curé, lui dit-il, de me laisser, en souvenir de vous, cette carte que vous n’avez pas l’air de vouloir emporter à Sainte-Anne ?


— De grand cœur, je te la donne, mon ami, reprit le curé en souriant, mais que feras-tu de cette carte, si je ne suis pas là pour t’enseigner son usage ? C’est un grimoire inintelligible pour toi.


— Oh ! que non pas, M. le curé ! repartit l’enfant, qui se redressa d’un air capable ; j’en ai vu déjà une chez M. le bailli d’Arthonay, il y a un an, quand mon père m’y mena avec lui, et comme je la regardais à pleins yeux, le commis de M. le bailli eut la bonté de m’expliquer tout ce qu’on trouvait sur cette carte, les routes et les chemins, les rivières et les cours d’eau, les collines et les vallées, les bois et les champs, les clochers et les paroisses, les villages et les villes. C’est plus aisé à comprendre que la lecture, et je me reconnais là-dedans, comme si je voyais tous les lieux qui y sont représentés. Oh ! la belle chose que la géographie !… N’est-ce pas ainsi qu’on appelle la science qui fait connaître les pays, sans y être et sans les avoir sous les yeux ? Je donnerais deux doigts de ma main, pour posséder cette science-là !


Le curé était touché et émerveillé d’une pareille envie d’apprendre et de savoir, chez un enfant qui annonçait ainsi ses dispositions naturelles à l’étude et qui promettait de ne pas rester en route dans la voie de l’instruction, s’il avait le bonheur d’arriver au but, sous la protection de Dieu. L’enfant remercia le curé de toutes ses