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tourner la tête, de peur de perdre courage en regardant du côté de sa mère, qui l’appelait d’une voix faible et dolente.


Il marchait d’un bon pas et ne s’arrêtait point en route : au bout de trois heures, il fut chez le vieux Curé, qui venait de dire sa messe et qui, le voyant seul, s’imagina que cet enfant était envoyé en toute hâte pour l’appeler auprès du lit d’un mourant. Comme il n’avait pas été averti de la mort du père de Valentin, il pensa qu’on venait le chercher pour administrer les derniers sacrements au père ou à la mère de cet enfant.


— Qu’est-ce qui est en danger de mort chez toi, mon ami ? lui dit-il avec intérêt : ton père et ta mère, mon enfant, ne sont pas très vieux, et toi, pauvre petit, tu es bien jeune. Je vais prendre les saintes huiles et tout ce qu’il faut pour la cérémonie…


— Monsieur le curé, interrompit naïvement Valentin, les choses se sont passées sans vous : mon pauvre père est mort, il y a cinq jours, et en voilà quatre qu’il est enterré dans notre cimetière d’Arthonay. Il n’y avait donc pas lieu de vous déranger, et aussi je ne viens à vous que pour moi.


— Pour toi ? demanda le curé, un peu surpris de cette visite tardive. Je ne comprends pas, objecta-t-il d’un ton de reproche, qu’on enterre un bon chrétien comme un païen, sans prêtre et sans prières des morts !


— Oh ! Monsieur le curé, repartit l’enfant, les prières n’ont pas manqué : c’est le curé de la commune voisine qui les a dites ; mais mon père étant décédé subitement, le digne homme, vous n’aviez plus rien à voir là-dedans. Je