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de négligence ou d’oubli et lui ordonna en pénitence un jeûne extraordinaire. Le Père Griffon, qui savait bien ne pas avoir rêvé, sonna une seconde fois plus réellement et plus efficacement que la première ; mais il n’échappa point aux remercîments goguenards des écoliers, qui répétaient, en défilant devant lui :


— Grand merci, père Griffon ! Nous avons ronflé une bonne heure de plus, à votre santé : nous ne maudirons pas votre satanée cloche, si vous nous laissez dormir ainsi tout notre soûl, ô digne père Griffon !


Et le Père Griffon, qui ne soupçonnait pas la vérité, jugeant, aux éclats de rire, qu’on se moquait de lui, grommelait entre ses dents, enrageait et se promettait d’avoir sa revanche, dès qu’un de ces railleurs deviendrait son justiciable.


— Quoi ! mon Père, vous êtes si matinal ? lui dit Crébillon, en ayant l’air d’ignorer quelle heure il était, quoique le crépuscule l’indiquât assez ; aviez-vous la puce à l’oreille, pour vous lever plus tôt que de raison ? Cela peut vous enrhumer, père Griffon, cela peut vous gâter le teint ; mais vous avez sans doute souffert du cauchemar, cette nuit, ou bien le Moine-bourru vous aura fort maltraité, au sortir du lit ?


Et tout le monde riait de ces interrogations adressées inutilement au sourd ébahi, pour qui la grimace sardonique de Crébillon était aussi peu compréhensible que ses paroles.


Le Moine-bourru, dont Crébillon demandait des nouvelles au sonneur, était connu au collège de Louis-le-Grand, par une ancienne superstition, qu’on retrouve encore