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qui me manque, et si vous le jugez à propos, je serai heureuse d’être présentée, sous vos auspices, à Monseigneur le duc d’Orléans.


— Nous allons donc de ce pas chez son Altesse Royale Madame, dit le comte de Saint-Aignan. Quant à vous, maître Langeli, je vous dispense de porter la queue de la robe de madame la marquise de Sévigné.


— Vous savez, Monseigneur, reprit vivement Langeli, que sa Majesté daignera entendre, ce soir, le clavecin magique du sieur Raisin, ex-organiste de la ville de Troyes ? Nous nous retrouverons donc l’un et l’autre, à cette occasion, en face de sa Majesté. Quant à madame la marquise, je désire qu’elle se souvienne, comme je m’en souviens et m’en souviendrai toujours, de la gracieuse épigramme qu’elle m’a jetée jadis au visage, devant ma bonne maîtresse la reine-régente Anne d’Autriche : « Il y a ici-bas tant de fous, dont les agréables folies sont gratuites, que je ne comprends pas comment on trouve bon de payer les folies maussades de Langeli. » Adieu vous dis, Madame la marquise : vous vous rappellerez que tout se paie ici, même les folies des autres.


Langeli salua encore, d’un air goguenard, et s’enfuit en poussant des éclats de rire. Le comte de Saint-Aignan était indigné et fit mine de donner un ordre pour mettre à la raison le fou du roi.


— Ce malotru semble se réjouir d’une méchanceté qu’il aurait faite, dit-il inquiet et préoccupé. En tout cas, Madame la marquise, il accuse un sentiment de vengeance contre vous et contre votre mari défunt. Il faudra débarrasser la cour de cette vermine.