Page:Lacroix - Contes littéraires du bibliophile Jacob à ses petits-enfants, 1897.djvu/277

Cette page n’a pas encore été corrigée

sang, et même, si je ne réussis pas, par ta faute, oui, par ta faute, je t’étranglerai de ma main !


Tout à coup, un cri étouffé fut suivi de la chute d’un corps, derrière la tapisserie, qui formait dans la chambre une espèce d’alcôve ou de cabinet. C’était mademoiselle de Sévigné, qui venait de s’évanouir, sous l’empire de l’émotion ou de la crainte. Mais, comme tout rentra dans le silence, à la suite de ce bruit imprévu et inexpliqué, le comédien et sa mère, qui en avaient été surpris plutôt qu’effrayés, ne se rendirent pas compte de son origine et ne cherchèrent pas à la découvrir.


— Il y a du monde, dans une chambre voisine, où l’on a fait tomber quelque chose ? dit la bohémienne, en baissant la voix. À Dieu ne plaise qu’on n’ait pas entendu la menace horrible que tu as faite à ce pauvre petit ! On nous prendrait pour des bourreaux. C’est mal, Jacques, c’est le fait d’un mauvais père, que de martyriser ainsi un enfant !


L’enfant était rentré, en pleurant, dans l’intérieur du coffre, où une cachette lui avait été ménagée, et le père, sans lui adresser une parole de tendresse ou d’encouragement, s’était hâté de refermer soigneusement l’étroite issue, par laquelle le petit prisonnier avait regagné son gîte. Le musicien ne répondit pas au reproche de sa mère et se jeta, l’air hargneux et renfrogné, dans un fauteuil où il feignit de s’endormir.


La vieille femme s’était accroupie contre le coffre où l’enfant était caché, et elle pleurait, la tête appuyée sur la cloison de bois, derrière laquelle ce malheureux enfant pleurait sans doute aussi. Après quelques instants