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— Assurément, répondit-elle sans s’émouvoir plus qu’à l’ordinaire ; mais nous ne les verrons pas.


— Pourquoi cela, puisqu’ils se laissent voir, ces honnêtes revenants ?


— Parce que de leur naturel les revenants fuient qui les cherche et cherchent qui les fuit.


— Vous qui les avez vus, maître Jean-Pierre, saurez-vous dire comme ils sont faits ? s’enquit Germain.


— Le premier, que j’ai vu, était enveloppé d’un drap blanc et dansait, au clair de la lune.


— Celui qu’il a vu ensuite, continua Marie-Jeanne, n’était pas plus gros qu’une tonne, mais il grognait comme un porc et il agitait des bras plus longs que des faucilles.


— J’en ai vu un autre couvert de poils noirs, reprit le jardinier renchérissant sur le récit de sa femme.


— Quant à celui que j’ai rencontré, sur la brune, dans le cellier, interrompit encore la jardinière, il avait l’apparence d’une naine, mais cette naine était pourvue de cornes et d’une queue en façon de boudin…


— Eh bien ! je serais charmée d’avoir en spectacle ces messieurs les revenants ! dit Antoinette, qui entra enfin, avec son amie, dans une salle basse du château, où Marie-Jeanne et son mari ne les suivirent qu’avec répugnance, en se disposant à s’enfuir au moindre sujet d’alarme. Tarderont-ils à paraître, vos revenants ?


— Il faut que la nuit soit plus noire, repartit vivement Jean-Pierre : les revenants n’aiment pas plus le grand jour, que les voleurs.


— Jésus de Dieu ! Mademoiselle, est-ce que vous pensez sérieusement à passer la nuit ici ? demanda la vieille,