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enfuie au bois avec le loup, disait Marie-Jeanne.


— Et ma très chère et très honorée dame de La Garde ? dit la vieille, en avançant la tête dans le carrosse pour chercher si cette dame n’y était pas. Qu’avez-vous fait de notre dame, compère Germain ?


— Elle ne vient pas céans, du moins aujourd’hui, répondit le cocher. Elle ne saurait s’en aller de Saint-Germain, en cette vilaine saison.


— C’est vrai, cela, que la saison ne vaut pas grand’chose, et il a fait, ces jours-ci, une rude froidure.


— Il ne fait pas chaud encore, la mère, dit Antoinette, et l’on s’en aperçoit en plein air, où le vent nous coupe le visage. Entrons, je vous prie, pour nous entretenir de tout ce qui s’est passé ici, depuis que j’en suis dehors.


— Entrer là-dedans ! s’écria Marie-Jeanne, en reculant : ce serait pour que le diable nous emportât !


— Le diable ! dit mademoiselle de La Garde, en éclatant de rire : pourquoi pas Croquemitaine ?


— Oh ! ma bonne demoiselle ! reprit le jardinier, qui unit ses efforts à ceux de sa femme, pour dissuader Antoinette d’entrer dans la maison : il y aurait moins de danger à coucher dans un cimetière, que de s’aventurer dans le château. Madame de La Garde en fera jeter les murs par terre, quand on lui dira ce qui en est.


— Jean-Pierre, vous avez aussi une dose de la folie de votre femme ! Mais ce n’est ni le lieu ni l’heure d’établir là-dessus une discussion : nous avons froid, nous avons faim, nous avons sommeil, ce sont toutes choses qui vous exemptent d’un plus ample entretien à la porte. Allez nous quérir du fromage à la crème et du lait.