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du buffet de mon oncle, vous vous dorloterez dans votre lit en rêvant à la mascarade. Cependant c’est une belle chose qu’une mascarade ! Est-il donc si malaisé de trouver et d’inventer, à peu de frais, un déguisement ? Il ne faut que vêtir votre pourpoint à l’envers et acheter un masque de façon grotesque. Parbleu ! j’y veux aller avec vous !


— Allez-y, s’il vous plaît ! mais certainement vous serez mal reçu, sinon chassé par les valets, car la mascarade, inventée par un des poètes les plus raffinés de la cour, représentera la naissance de la déesse Vénus et son arrivée dans l’Olympe des Dieux. Or, pour cet effet, chaque convié est tenu d’avoir la figure de son rôle. Aussi, m’avait-on assigné le rôle d’un Prince des Ténèbres, de la suite de Pluton.


— Eh bien ! au lieu d’un seul prince, nous en ferons deux, pour le cortège de sa majesté infernale. Pardieu ! compagnon, je suis en veine d’imagination, et voici que je vous offre de diaboliques accoutrements pour la fête.


— Lesquels ? J’avais bien songé à porter seulement sur ma poitrine un écriteau indiquant mon rang et mes honneurs dans l’empire de Pluton… Mais, non, je resterai au logis, faute d’avoir vingt louis, que j’ai perdus sur parole, en jouant avec le marquis de Senneterre et qu’il serait homme à ne pas me réclamer.


— Baste ! si ce n’est que cet obstacle à vaincre, dans une heure je te procure quarante écus pour parfaire ta dette et nos menues dépenses. Écoute ce qu’il faut faire à cet effet : dès que je serai endiablé à ma guise, tu prendras bel et bien mes habits et tu les porteras chez mon