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excellait à peindre la miniature, dansait à merveille et jouait du luth en s’accompagnant de la voix, compléments indispensables d’une éducation de gentilhomme, à cette époque où la poésie, la peinture, la danse et la musique étaient les bien-venues à la cour et à la ville.


Scarron était d’une taille médiocre, mais élégante et gracieuse ; ses cheveux blonds, ses yeux bleus et son teint de femme, donnaient à sa physionomie une douceur, que ne démentaient pas son parler et son regard caressants ; il avait l’abord affable et le geste noble, avec cette exquise politesse qui était en usage dans les sociétés des beaux esprits. Malheureusement son père, dont le patrimoine avait été dévoré par d’anciennes dettes de famille, n’ayant pas les moyens de soutenir la position élevée que cet enfant était appelé à prendre dans la magistrature, fut contraint de lui ouvrir une autre carrière ; il décida donc que Paul Scarron entrerait dans les ordres ecclésiastiques.


Cette décision, il est vrai, avait été sollicitée de longue date par un vieil oncle du jeune Scarron, et cet oncle, chanoine du Mans, riche de deux abbayes en Beauce, s’engageait à faire son neveu héritier de tous ses biens pourvu qu’il en fît un prêtre. Scarron, d’une humeur joviale et libertine, ne sentait aucune vocation pour les devoirs austères de la prêtrise ; mais il dut obéir à l’autorité absolue de ses parents et surtout à la tendresse qu’il portait au bon chanoine, dont l’indulgente affection ne se scandalisait pas trop des espiègleries du petit mauvais sujet ; d’ailleurs, celui-ci voyait, dans les commencements de sa nouvelle carrière, une occasion de se donner du bon