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ses leçons, qu’avant ma dixième année, je travaillais à la casse assez proprement dans l’imprimerie des Griphes, les premiers imprimeurs de Lyon. Je gagnais honnêtement ma vie chez ces braves patrons, et j’y serais encore, si je n’avais pas eu le malheur de perdre mon père adoptif. Je pris dès lors en horreur le séjour de Lyon, et tout jeune que j’étais, je commençai à faire mon tour de France, tantôt comme compositeur, tantôt comme garçon de presse. Le sort me conduisit à Poitiers, il y a six ou sept mois, et je m’enrôlai, pour deux ans, dans l’imprimerie de maître Nicolas Courtois, où je me trouverais fort bien, s’il ne battait pas si dru ses apprentis. Enfin, suivant le dicton : Où la chèvre est attachée, il faut qu’elle broute…


— Mais vous ne me dites pas, mon enfant, ce qui m’intéresse le plus, interrompit Catherine, qui ne le quittait pas des yeux une minute. Racontez-moi comment et pourquoi ce nom de Desroches vous a été donné.


— J’y étais, certainement, dit-il en souriant avec candeur, mais je ne me rappellerais pas dans quelles circonstances je suis arrivé à Lyon par la Saône, une grande et belle rivière, qui passe à Lyon et va se joindre à la Loire. Mon berceau venait on ne sait d’où ; il avait descendu le fleuve, moi dedans et bien paisiblement endormi, à ce qu’on m’a raconté ; le berceau s’arrêta au pied d’un amas de roches, qui forment un écueil à l’entrée de la ville. Les bonnes gens qui m’avaient sauvé me servirent de parrains, en rapportant de quelle façon ils m’avaient trouvé dormant dans mon berceau : ce sont eux qui me nommèrent des Roches. Quant au nom de Jacques, qui devait être mon nom de baptême, il était inscrit sur le berceau et