Page:Lacretelle Silbermann.djvu/27

Cette page a été validée par deux contributeurs.

chemin. Ayant grandi dans une atmosphère traversée par les foudres de la loi, je redoutais également le jugement de la société. Ces scrupules de conscience et ce respect craintif retenaient mes actes et me faisaient placer avant toutes qualités la réserve et le renoncement. Quel succès, lorsque (souvent grâce à une habile dissimulation) je me sentais à l’abri de toute curiosité ! Quelle joie, lorsque je parvenais à triompher d’une intention suspecte ! Joie si forte et jugée par moi si salutaire que je ne résistais guère au plaisir de la provoquer par un artifice. Ainsi, je me laissais quelquefois envahir sournoisement par de mauvaises pensées, je favorisais leur développement dans mon imagination, je prenais plaisir à m’y exciter, puis, avec une sorte de passion, je coupais net ces mauvais rameaux. J’avais alors le noble sentiment d’avoir fortifié mon âme. De même, à Aiguesbelles, mon grand-père ordonnait au printemps que quelques