visées. L’existence avait perdu tout prix et m’apparaissait affreusement morne.
Cette impression provenait aussi de ce que Silbermann, en m’apportant une multitude de notions nouvelles, avait détruit la plupart de celles que je possédais. Et maintenant que son esprit mobile n’était plus là pour entraîner le mien, je m’apercevais de ces ruines.
Elles se trouvaient partout.
Enclin à contredire, prompt à exercer son sens critique, Silbermann m’avait rendu habile à discerner le défaut des choses. Ainsi, en matière de littérature, il avait l’habitude d’appuyer toute admiration par quelque dénigrement ; et comme son goût changeait souvent, il était fréquent de l’entendre dépriser par un raisonnement subtil une œuvre que peu auparavant il avait placée au-dessus de toute autre. Je l’avais trop écouté. Par ces rabaissements successifs il avait abouti à me démontrer l’imperfection de tout ce que j’avais