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solitaires de l’Atlantique. Restait un fils de lui, un fils orné de ses traits, de sa gloire, de ses malheurs, jeune âme en qui le souvenir et l’espérance refaisaient chaque jour la patrie : mais son père l’avait appelé d’un nom trop pesant ; le roi de Rome succomba sous ce fardeau, comme une fleur précieuse qui n’atteint pas son âge, courbée par l’étiquette à laquelle une main amie, mais imprudente, la condamna.

Aujourd’hui, Messieurs, la papauté est arrivée à une ère de son existence plus complète qu’aucune de celles qui précéda. La réaction qui avait eu lieu contre elle dans l’esprit public, à cause des événements du moyen âge, touche à son terme. On a compris que la nature de son développement, à cette époque, venait des circonstances et non des prétentions ; que ce développement avait été favorable aux peuples, à l’Europe et à l’humanité ; qu’au fond, les papes défendaient dans la liberté de leur élection, dans la sainteté des mariages, dans l’observance du célibat ecclésiastique, dans l’intégrité de la hiérarchie, une cause juste et civilisatrice. On a compris que le Souverain Pontife ne pouvait être dans la dépendance d’aucun prince chrétien, et que son indépendance, essentielle à la religion, l’est aussi à la paix des divers États. L’empire romain, l’empire d’Orient, l’empire d’Occident n’existent plus ; nul ne peut prétendre à dominer le Saint-Siège, et le droit public européen lui accorde une neutralité honorable dans les guerres que se font