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l’hérédité du génie, avait eu Charlemagne d’un père et d’un aïeul formant avec lui une triple génération d’hommes éminents. Charlemagne acheva l’œuvre de la Providence, et constitua définitivement la chrétienté en donnant au souverain pontificat une place désormais incontestée parmi les grands ressorts du monde. Le pape ne fut plus ni sujet indépendant par le martyre, ni seigneur équivoque par l’ascendant moral, ni tuteur du peuple par la nécessité : il fut ce qu’il devait être, souverain d’un territoire assez grand pour la liberté, trop petit pour la domination. Peu après, l’Orient, source de toutes les hérésies, se sépara de l’Occident sous le rapport spirituel, comme il l’était déjà sous le rapport temporel, et confirma, sans le vouloir, la suprématie du Siège apostolique, en cessant de faire partie de l’Église par cela seul qu’il cessait d’être attaché au centre de l’unité. La puissance impériale, au lieu de transporter à Constantinople le siège de la vitalité chrétienne, n’aboutit qu’à créer un schisme qui déshonora l’Église grecque, perdit l’empire, et livra plus tard l’un et l’autre aux mains des musulmans ; tandis que l’Église latine, appuyée sur la papauté, convertissait les barbares, et transportait en Occident le centre des affaires divines et humaines.

Ce n’était pas là pourtant le dernier mot de la Providence à l’égard de la chaire de saint Pierre : échappée à l’empire romain et au Bas-Empire, elle allait rencontrer de nouveaux périls, et avec eux