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mais ce qui est au-dessus des forces de l’homme. Et cette infaillibilité s’est réellement manifestée en elle par une constance indestructible dans ses dogmes et sa morale, malgré la différence des temps, des lieux et des hommes.

Pourquoi ne riez-vous pas quand je vous dis que je suis infaillible, non pas moi, mais l’Église dont je suis membre, et qui m’a donné mission ? encore une fois, pourquoi ne riez-vous pas ? C’est que l’histoire de l’Église lui donne quelque droit, même à vos yeux, de se poser comme infaillible ; c’est que, dans une suite de dix-huit siècles accomplis, à travers tous les mouvements de l’esprit humain, elle est restée ferme comme une pyramide. Vous voudriez bien l’insulter à cause de cela même ; vous dites bien : Ce n’est qu’un tombeau, et il n’y a au fond qu’un peu de cendre. Oui, mais ce tombeau, c’est celui du Christ, cette cendre est une cendre qui vit longtemps, et toujours la même, et malgré vous, elle vous donne à penser.

C’est, direz-vous, le principe même de l’infaillibilité qui a produit ce résultat. Mais on a beau se croire infaillible, si on ne l’est pas réellement, rien ne peut empêcher les variations et les contradictions produites par la différence des esprits. Comment se fait-il que Grégoire XVI et les évêques de son temps aient les mêmes pensées que tous leurs prédécesseurs, eux qui vivent sous des influences si nouvelles ? Que le peuple croie comme les chefs de la doctrine, parce qu’il les regarde comme infaillibles,