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hommes sans une puissance ? Qu’est-ce que le genre humain lui-même, s’il est désarmé ? Il faut donc qu’outre la hiérarchie, l’Église possède une puissance. Or il n’y a que deux sortes de puissances : la force qui tue le corps, la persuasion qui tue l’âme, pour en mettre une autre à la place. Puissance qui tue le corps, puissance qui tue l’âme en la changeant, laquelle a été donnée à l’Église de Dieu ?

Un jour, dans une ville de l’Orient, des hommes étaient en prière dans une chambre, et ils attendaient là quelque chose qui leur avait été promis. Tout à coup un bruit vint du ciel comme un vent violent qui remplit toute la maison où ils étaient ; des langues de feu parurent sur leurs têtes, et, remplis de l’esprit de Dieu, ils commencèrent à parler toutes les langues qui se parlent sous le ciel, et un nommé Pierre, se tenant debout, dit ceci à la multitude : Hommes juifs, écoutez ; ce n’est pas que ceux qui vous parlent soient ivres, mais c’est l’accomplissement de la parole du Prophète : L’Esprit de Dieu se répandra sur toute chair, vos fils et vos filles prophétiseront, vos jeunes gens verront des visions, et vos vieillards songeront des songes[1]. La puissance que Dieu donna à son Église fut donc la puissance de son esprit. Mais c’est là une puissance invisible, et Dieu, qui fait tout avec harmonie, voulut et devait donner aussi à son Église, passant dans le temps, une puissance du temps, c’est-à-dire

  1. Actes des Apôtres, chap. II, vers. 14 et suiv.