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de nous, des essais d’apostolat, des hommes qui, après un siècle de destruction, avaient trouvé convenable et beau d’édifier : où choisirent-ils leurs apôtres ? Dans les hauts rangs du monde ; ils appelèrent à eux des savants, des chefs d’industrie, des fonctionnaires de l’État. Jésus-Christ ne fit pas de même : il s’agissait de délivrer le genre humain de l’erreur ; il choisit ses apôtres non parmi les oppresseurs de l’intelligence, mais parmi les opprimés ; non parmi les philosophes et les savants, mais parmi les pauvres et les simples. Un jour, se promenant sur les bords d’un lac de Galilée, il aperçut deux pêcheurs et il leur dit : Suivez-moi, je ferai de vous des pêcheurs d’hommes[1]. Et tels furent les premiers libérateurs de l’esprit humain.

L’apostolat étant fondé comme la souche de l’épiscopat, l’univers était bien embrassé dans ses diverses parties ; tous ces hommes allaient partir pour répandre l’Évangile sous les quatre vents du ciel. L’Église cependant n’avait point encore tous les éléments nécessaires à l’universalité : car qui retiendrait dans un seul faisceau, dans une seule doctrine, tous ces apôtres dispersés ? Qui empêcherait les Églises particulières de devenir, avec le temps, diverses et opposées ? Qui les mettrait en communication les unes avec les autres ? Il n’y a point d’universalité sans unité. Il fallait donc un centre à l’apostolat, un chef unique aux apôtres et aux évêques,

  1. Saint Matthieu, chap. IV, vers. 19.