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le mauvais état de la discipline ecclésiastique et par la résurrection des sciences païennes, ébranlaient en Occident l’œuvre du Christ, pendant que la mauvaise issue des croisades achevait sa ruine en Orient, et ouvrait aux Barbares les portes de la chrétienté. Les papes, il est vrai, résistaient avec une immense vertu aux dangers croissants de cette situation. Ils domptaient l’empereur Frédéric Ier, animaient les peuples à de nouvelles croisades, tenaient des conciles contre l’erreur et la corruption, veillaient à la pureté de la doctrine dans les écoles, resserraient dans leurs puissantes mains l’alliance de la foi et de l’opinion européenne, et du sang ému de ce vieux tronc pontifical on voyait naître Innocent III. Mais nul ne peut soutenir tout seul le poids des choses divines et humaines; les plus grands hommes ont besoin du concours de mille forces, et celles que la Providence avait accordées au passé semblaient plier sous le poids de l’avenir. L’ouvrage de Clovis, de saint Benoît, de Charlemagne et de Grégoire VII debout encore et vivant des restes de leur génie, appelait à son secours une nouvelle effusion de l’Esprit en qui seul est l’immortalité. C’est en ces moments suprêmes qu’il faut être attentif aux conseils de Dieu. Trois cents ans plus tard il abandonnera la moitié de l’Europe à l’erreur, pour tirer un jour de l’erreur des triomphes dont nous commençons à entrevoir le secret : mais alors il lui plut d’aider son Église par la voie directe de la miséricorde. Jésus-Christ regarda ses pieds et ses mains percés pour