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après midi; et vers la fin de la station, l’orateur fut comme porté en triomphe de l’église à sa demeure, au milieu des acclamations publiques. A Strasbourg, les juifs, les protestants, les ra-tionalistes rivalisaient d’empressement avec les catholiques pour remplir la vaste cathédrale, se presser aux pieds de l’orateur, s’enivrer de son éloquence et méditer son enseignement. Souvent le flot de la grâce entrait aussitôt dans le sillon qu’avait creusé cette puissante parole et l’incroyant éclairé, convaincu, ravi, comme le centurion au Calvaire, venait se jeter aux pieds de l’apôtre encore ému, faisait amende honorable à ce Christ qu’il avait si longtemps blasphémé, et implorait de son ministre le pardon. D’autres, sans rendre encore les armes, emportaient au cœur le trait de feu qui les avait frappés, et Dieu leur envoyait à une autre heure des ministres plus humbles, qui jamais peut-être n’auraient pu frapper le grand coup, mais qui savaient d’une main soigneuse retirer le trait, calmer la douleur, et rendre à l’âme la vie de Dieu. Ceux enfin qui n’en venaient pas là, ne riaient plus, du moins, d’une religion qui savait se susciter de tels défenseurs; et s’ils ne se jetaient pas à genoux, ils tenaient à honneur de respecter et même de louer le croyant. Cependant celui qui avait opéré ces merveilles, rentré dans