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— XXVIII —

rendez-vous devant la chaire de Notre-Dame. Et si les croyants en faisaient la garde d’honneur, on y reconnaissait sans peine les fils de Voltaire, mêlés aux demeurants de la Révolution et de l’Empire, les incrédules avec les rationalistes, et à côté d’eux, une foule d’âmes avides de vérité et déconcertées de ne pas avoir trouvé dans le socialisme moderne le secret de la vie et du bonheur pour le genre humain. Ainsi le mur de séparation élevé par plusieurs siècles de calomnies entre l’Église et la société, entre la patrie du ciel et celle de la terre tombait chaque jour aux puissants éclats de cette voix, comme les murs de Jéricho au son des trompettes de Josué ! Ce merveilleux enseignement, repris à deux époques différentes, dura dix années. Mais dans l’intervalle un événement mémorable avait transformé l’orateur en un homme nouveau. L’abbé Lacordaire continuait depuis deux ans le cours de ses conférences, quand tout à coup on le vit s’arrêter de lui-même sur ce chemin glorieux (1836); et, malgré les instances de son archevêque, Mgr de Quélen, qui le proclamait un nouveau prophète, il descendit de cette chaire de Notre-Dame pour se retirer quelque temps, comme il le disait, devant sa faiblesse et devant Dieu.